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Les hirondelles et moi, émoi, émoi

Les hirondelles sont de moins en moins nombreuses au fil des années dans mon village de Tranzault en Bas-Berry. L’idée que puissent advenir des printemps sans hirondelles m’horrifie. L’hirondelle dont il est question ici est une espèce particulière : l’Hirondelle rustique connue aussi sous le nom d’Hirondelle de cheminée. C’est la plus répandue, la plus caractéristique des milieux agricoles. J’ai cru longtemps que c’était la seule.

L’hirondelle rustique (Hirundo rustica) est dotée d’une redingote bleu nuit. © I. Malene - CC BY 2.5

Depuis mon enfance, je suis attaché aux hirondelles. Difficile d’en donner toutes les raisons, comme il est difficile de dire pourquoi on aime ce qu’on aime. Comme les vols ordonnés des grues, les hirondelles ont rythmé l’écoulement de mes années. Si les grues ne font que passer deux fois l’an, nous regardant souvent de très haut, nous ignorant possiblement, les hirondelles s’installent chez nous pour les plus beaux jours, et s’arrangent pour repartir plus nombreuses qu’elles sont venues.


Ce sont elles les plus sûres messagères des équinoxes. Si une hirondelle ne fait pas le printemps, la première visite d’un couple dans une grange signale qu’un renouveau de vie se prépare à la faveur des jours plus longs et plus chauds. Et quand les rassemblements commencent, c’est un message fort que l’été s’en va, que la rentrée des classes est imminente. Les chapelets d’hirondelles sur les fils électriques et téléphoniques restent associés pour moi à ce mélange bizarre de nostalgie des vacances, d’appréhension de l’internat et d’envies de savoir que je ressentais en les voyant se concerter avant leur grand départ. Leur destination m’était mystérieuse et me portait à rêver de voyages périlleux et de contrées lointaines. Je ne doute pas qu’elles m’aidaient à accepter mon départ au collège à seulement 15 km, bien que les hirondelles y fussent notablement différentes de celles de mon village : plus grandes, plus sombres, jamais à terre (ce n’était pas des hirondelles mais des martinets noirs).


Mes hirondelles n’ont pas le plumage aussi clinquant que les pics ou les martins pêcheurs, pas l’allure pimpante de la huppe fasciée, pas le chant mélodieux du rossignol, pas la gracieuse fragilité des mésanges. Au sol, leur élégance est des plus modestes : une redingote bleu-noir avec une longue queue fourchue, un plastron blanchâtre, une petite touche de brun roux sur le front et la gorge. Leur progression mal assurée sur leurs pattes minuscules nous révèle qu’elles ne sont pas faites pour le plancher des vaches. Leur territoire c’est le ciel qu’elles occupent plus sûrement que les anges. Je ne connais pas d’oiseaux aussi agiles, aussi acrobatiques, aussi aériens que les hirondelles. Mes hirondelles, c’est la quintessence du vol et donc la quintessence de l’oiseau.


Je ne connais pas non plus d’oiseaux plus compagnons naturels de nos vies que les hirondelles. Il arrive qu’un rouge-gorge s’approche tout près de moi en hiver, mais il me dissimule toujours son nid. Souvent les rouges-queues, les moineaux et les pigeons s’installent dans nos bâtiments, mais jamais ils n’exposent leurs couvées à notre vue et à portée de nos mains, comme le font les hirondelles. Cette confiance que cet oiseau nous fait me touche et m’oblige à la mériter.

Dans les airs, l'hirondelle rustique est le plus agile des acrobates. © Michel Rauch

Je sais, et ça me rassure, que je ne suis ni premier, ni seul à apprécier les hirondelles. A cause peut-être du mystère de leur migration et de leur utilité reconnue de chasseurs infatigables d’insectes parasites des animaux de ferme, les paysans de mon enfance en faisaient des bêtes à Bon Dieu (à l’instar des coccinelles) et se gardaient bien de profaner leurs nids. Elles étaient aussi leur météo : leur vol haut assurait le beau temps, leur vol en rase-motte annonçait l’orage. Si leur place est modeste dans nos habitations, elle est grande dans l’imaginaire collectif. Beaucoup de poètes ont célébré les hirondelles (Théophile Gautier, Sully Prudhomme, Victor Hugo, Louise Michel…) ; certains les ont chantées (Bourvil, Charles Trenet, Gilles Servat …). A l’hirondelle s’accrochent des légendes jusque sur les plantes : ainsi la chélidoine dont le latex soigne les verrues, tire son nom du nom latin de l’hirondelle (Chelidonium) parce qu’on croyait que l’hirondelle s’en servait pour ouvrir les yeux de ses petits. Ce marqueur des équinoxes sur la marche du soleil est aussi symbole de liberté, de fidélité, d’endurance, d’enthousiasme. L’hirondelle est l’oiseau national de l’Estonie, emblème de ciel bleu et de joie éternelle. C’est un oiseau d’heureux augure, un porte-bonheur. Si l’hirondelle devait disparaître, elle serait mise assurément au Panthéon des vivants non humains.


Nul n'est censé ignorer la loi

L’hirondelle rustique est protégée par la loi du 10 juillet 1976 sur la protection de la nature et l'arrêté ministériel du 29 octobre 2009 fixant la liste des espèces protégées sur le territoire national. A ce titre, en application de l'article L411-1 du code de l'environnement, sont interdits en tout temps « la destruction ou l'enlèvement des œufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l'enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d'animaux de ces espèces ou, qu'ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ». Tout contrevenant est passible d'une peine d'emprisonnement de 3 ans et de 150 000€ d’amende (art. L415-3 du Code de l'environnement).


C’est difficile d’imaginer qu’un tel oiseau, protégé par la loi, puisse disparaître. Le constat est pourtant partagé : il y a de moins en moins d’hirondelles dans les granges et sur les fils. Les comptages confirment ce que chacun perçoit : d’après Vigie Nature, les effectifs d’hirondelles rustiques ont chuté en France de 42% entre 1989 et 2019, sensiblement comme l’ensemble des oiseaux des milieux agricoles (-38%). Ce n’est pas au Panthéon de nos oiseaux que je souhaite voir les hirondelles, mais fidèlement dans mon village, pour garder de bonnes raisons de lever les yeux au ciel. Voyons donc de plus près.


Notre Hirondelle rustique (Hirundo rustica) appartient à la vaste famille des Hirundinidés qui regroupe près de 90 espèces à travers le monde. Elles ne varient que par leur plumage, par leur queue plus ou moins longue et fourchue, et par leurs nids. Elles sont toutes taillées pour le vol avec un corps aérodynamique et des ailes longues et pointues. La plus proche cousine de l’Hirondelle rustique est l’Hirondelle de fenêtre (Delichon urbicum) qui préfère la ville et construit son nid, non pas à l’intérieur des constructions humaines, mais sous le rebord des toitures. D’autres espèces moins répandues nichent en Europe : elles diffèrent par leurs couleurs (l’Hirondelle rousseline) ou par leur habitat (l’Hirondelle de rivage, l’Hirondelle de rochers). D’autres se reproduisent en Afrique, d’autres nichent au Canada et aux États-Unis et hivernent en Amérique Centrale, au Brésil et en Argentine ; d’autres encore se reproduisent en Chine, en Corée, au Japon et migrent dans la péninsule indochinoise, en Malaisie ou en Indonésie. J’ai plaisir à penser que la quasi-totalité des humains vivent avec des hirondelles qui ne diffèrent qu’insensiblement les unes des autres. Ces oiseaux font partie de ce que les humains ont en commun, comme les astres et l’eau. Sur tous les continents, dans toutes les régions du monde, de l’Alaska à l’Afrique du Sud, du bassin méditerranéen à l’Australie, des hommes et des femmes s’émerveillent de leur virtuosité et s’interrogent sur leurs mystérieux conciliabules avant leur migration vers l’inconnu. Tous leurs doivent une part de leurs imaginaires.


Notre seule Hirondelle rustique occupe tout l’hémisphère nord. Commensale par vocation, elle semble s’être répandue avec l’expansion humaine. Rurale chez nous, elle est présente en Asie et en Afrique du Nord jusque dans le cœur de grandes villes. Espèce migratrice par excellence, elle est comme un trait d’union entre le Nord qu’on dit riche et le Sud qu’on tient pour pauvre. Les baguages révèlent que les hirondelles nées en France vont passer l’hiver en Afrique de l’Ouest, de la Guinée au Cameroun ; celles originaires du nord de l’Europe vont jusqu’au sud de l’Afrique. Ambassadrices des continents, les hirondelles rustiques relient les humains de toutes couleurs. Elles les mettent dans le même bateau, pour le meilleur et pour le pire.


Les hirondelles dans mon village : problèmes et enjeux

Les hirondelles viennent chez nous pour se reproduire. Leur problème est d’abord de trouver un endroit pour construire leur nid. Étant sans défense et ne sachant pas construire un nid sécurisé comme leur cousine urbaine, il leur faut un abri assez fermé pour mettre leur couvée à l’abri des prédateurs. Avant que les hommes ne construisent des habitations, elles s’installaient dans les cavernes, mais depuis longtemps elles trouvent dans les constructions humaines des lieux de nidification bien plus nombreux et propices. Au temps du chauffage au bois, ne craignant pas la fumée, elles ont souvent colonisé les cheminées au point d’en prendre le nom. Ce sont les bâtiments agricoles qui se sont révélés les plus favorables. Une grange basse et profonde, une bergerie, une écurie, une étable ou même une cave avec une petite fenêtre laissée entrouverte … autant de solutions idéales abondantes au temps des petites fermes paysannes, autant des solutions qui se raréfient. Les fermettes une à une deviennent des résidences, principales ou secondaires, où même les fenêtres des dépendances restent closes par crainte des vols, où l’on ne tolère plus le moindre risque de salissure dans le garage de l’auto ou l’abri du barbecue. Subsistent bien, ici ou là, de grands bâtiments agricoles où des bovins sont engraissés, mais ils sont faits le plus souvent de matériaux métalliques peu favorables à l’accrochage des nids et sont, pour des raisons sanitaires, trop ouverts pour sécuriser les nichées (notamment à l’égard des pies capables de dévorer tous les oisillons). L’argument de la propreté, souvent avancé pour ne pas accepter les hirondelles un peu salissantes est pourtant contournable. Yannick, un jeune agriculteur bio d’une commune voisine, en apporte une preuve savoureuse. Il me raconte qu’à défaut de nicher dans le vaste hangar de nourrissage de ses vaches laitières, les hirondelles construisent leur nid dans la salle de traite, plus basse et plus sombre. Lors d’une visite de contrôle sanitaire, une responsable des services vétérinaires l’a mis en demeure de détruire le nid jugé insalubre. Il lui a simplement dit : « Faites-le vous-même, je vous fournis un outil pour cela, mais je vous préviens, je vous filme ». L’affaire fut classée. Il suffit le plus souvent d’une planchette judicieusement placée sous les nids pour recevoir les quelques brindilles et déjections qui en tombent.


On peut douter toutefois que nos hirondelles retrouvent les conditions idéales des anciennes étables à vaches où elles trouvaient gîte et couvert et pouvaient aligner jusqu’à une dizaine de nids, profitant alors du gros avantage de la vie en colonie qui est la détection plus rapide de l’arrivée d’un prédateur. Dans les fermes céréalières d’aujourd’hui, prolifère leur principal concurrent, le moineau domestique (granivore) qui ne se prive pas d’annexer leurs nids. Cette question des sites de nidification est d’autant plus sérieuse que l’hirondelle est philopatrique : elle revient fidèlement à l’endroit où elle est née et où, le cas échéant, elle a déjà couvé, ce qui lui donne l’avantage d’une parfaite connaissance des lieux et des environs. Si elle n’en trouve plus la possibilité, elle peut en disparaître pour toujours.


Notre hirondelle utilise la boue comme mortier pour fabriquer son nid. © Óscar Díez Martínez

Un site de nidification favorable ne suffit pas. Faut-il encore à l’hirondelle des matériaux pour la construction du nid qui commence dès que le couple s’est retrouvé ou constitué. En forme de demi-coupe, le nid est accroché au plus près du plafond sur un mur ou une poutre. Il sera simplement regarni de brins d’herbe sèche, de crins, de poils et de petites plumes s’il s’agit d’un nid ancien. Mais tout nouveau nid suppose pour son gros-œuvre la disponibilité de boue qui seule permet son collage sur le bois ou la pierre. On a pu mettre en évidence qu’un nid est constitué de l’apport de 750 à 1400 boulettes, ce qui peut prendre de une à trois semaines selon la météo et la distance entre le nid et la source de boue. Des printemps secs exposent nos hirondelles à des difficultés d’approvisionnement en mortier d’autant que les mares, autrefois nombreuses pour l’abreuvage des animaux domestiques, ont été comblées pour de prétendues raisons sanitaires, tant par les particuliers que par les collectivités. En allant assez loin, jusqu’à l’étang ou la rivière la plus proche, nos hirondelles trouvent toujours de la boue mais beaucoup d’énergie est alors dépensée pour les voyages, ce qui retarde la finition du nid et donc la ponte (3 à 6 œufs), jusqu’à rendre impossible la deuxième ou la troisième couvée de la saison, en raison des durées d’incubation (environ 15 jours) et de nourrissage des poussins (environ 3 semaines). La reproduction en est diminuée d’autant.


Le succès de la reproduction dépend toutefois d’un autre élément plus important encore. L’hirondelle étant exclusivement insectivore, c’est de l’abondance des insectes que dépend en fin de compte le nombre d’hirondeaux par an et par couple. Plus les insectes volants sont nombreux, moins la dépense énergétique des parents est grande pour les capturer, mieux les poussins sont nourris et donc en bonne forme physique au moment du grand départ. C’est dans les régions d’élevage que ces conditions sont le mieux remplies. La présence importante de bétail favorise par ses excréments la pullulation des insectes, notamment des mouches dont raffolent les hirondelles. Ce fut le cas dans le bocage du Bas-Berry jusqu’à ces dernières décennies. Aujourd’hui, l’élevage est en recul pour de multiples raisons (prix insuffisamment rémunérateurs, aides publiques moins importantes que pour les grandes cultures…). Sur ma commune, les troupeaux de moutons autrefois nombreux tendent à disparaître ; l’élevage bovin s’est concentré et transformé ; les vaches laitières sont quasi disparues ; autrefois majoritairement naisseurs, les éleveurs sont tous devenus engraisseurs et consacrent donc une grande partie de leurs terres à des cultures nourricières pour le bétail (maïs, triticale, féverole …). En stabulation, les mouches sont combattues par des larvicides et des insecticides pour éviter la transmission de maladies infectieuses. En pâture, les troupeaux ne subsistent guère que dans les prairies des fonds de vallées où les traitements antiparasitaires du bétail qui contaminent les fèces peuvent encore nuire à l’entomofaune. Partout ailleurs, les grandes cultures (blé, orge, colza ...) progressent, entraînant la suppression des haies arborées où se réfugiaient les insectes par gros temps. Du coup, les hirondelles se trouvent confrontées à des pénuries de nourriture.


Le facteur aggravant des grandes cultures est l’utilisation massive de biocides, notamment d’insecticides, nommés insidieusement « produits phytosanitaires ». Des pesticides systémiques utilisés pour lutter contre des ravageurs des végétaux se répandent dans l’environnement et contaminent durablement les sols, les cours d’eau, l’air et les plantes non cibles. Il en résulte une toxicité pour de nombreux invertébrés non cibles, accentuée par l’« effet cocktail » des diverses molécules utilisées. Les dégâts des néonicotinoïdes sur les abeilles ont été amplement documentés et l’effondrement des populations d’insectes est désormais avéré et reconnu en lien avec les pesticides utilisés en agriculture. Le journal « Le Monde » du 9 novembre 2019 révèle qu’une étude publiée le 31 octobre dans la prestigieuse revue Nature établit que la biomasse d’arthropodes a chuté, sur 300 sites de 3 régions allemandes, de 67% entre 2008 et 2017 ! Cette nouvelle stupéfiante eut peu de retentissement. Peut-être corroborait-elle l’observation commune : tous les automobilistes ont remarqué que les parebrises ne sont plus couverts de cadavres d’insectes comme ils l’étaient en été il y a seulement 10 ans. Si peu de personnes s’en inquiètent, c’est que des insectes nous incommodent souvent (mouches, taons, moustiques…) et que par conséquent la plupart s’accommodent de leur diminution ou même s’en satisfont. Les dommages collatéraux en sont rarement perçus en raison de l’ignorance des liens entre les vivants. La raréfaction des insectes explique pourtant largement l’effondrement de toute la faune insectivore : les oiseaux des champs ont perdu près du tiers de leurs effectifs en 15 ans, les chauves-souris ont décliné de 30% en une décennie et les amphibiens semblent aussi en déclin. Chez les hirondelles rustiques (en régression de 41% entre 2009 et 2019), on sait que la chute du nombre de proies affecte la reproduction de diverses manières, notamment la diminution de la taille des pontes, la santé des poussins et le nombre de secondes pontes.


Nourrissage des poussins au nid. © Alain Gagne

En dépit de la mise en garde des scientifiques, des pressions faites pour protéger certains insectes non cibles (notamment les pollinisateurs) et des engagements de l’État (Plans Ecophyto), l’usage des pesticides ne cesse d’augmenter (+20% entre 2009 et 2018). Les raisons en sont multiples : retournement des prairies en lien avec le recul de l’élevage, diminution des jachères au profit des cultures de rente, exigences des acheteurs sur l’apparence des produits (fruits et légumes), normes commerciales (« zéro insecte vivant » dans le grain livré), demande encore faible de produits alimentaires biologiques (à peine plus de 6% en 2019) … Les hirondelles sont donc exposées à une réduction drastique des insectes dont elles se nourrissent et nourrissent leurs poussins, jusqu’à compromettre leur reproduction sur leurs territoires habituels.


Je me plais à imaginer la rencontre d’une hirondelle avec un héron garde-bœufs déprimé :

- Je vais bientôt n’avoir plus que des campagnols à becqueter, dit le héron, et toi plus rien du tout.

- Un coup de froid ? s’inquiète l’hirondelle.

- Pire, dit le héron. J’ai appris que les humains deviennent végétariens et même véganes. Bientôt plus de vaches et de moutons dans les champs, plus d’arbres pour les mettre à l’abri des bourrasques et des canicules, seulement des cultures à perte de vue arrosées de pesticides, et donc … plus d’insectes.

- Ne délire pas, dit l’hirondelle ; toutes les terres ne sont pas favorables aux grandes cultures, les vaches et les moutons seront encore longtemps appréciés non seulement pour les tables mais pour débroussailler les montagnes et les marais. Et bientôt les humains élèveront des insectes à grands frais pour polliniser leurs fleurs, d’autres pour faire de l’humus, d’autres pour maintenir des oiseaux dans leur ciel. Les humains sont comme ça : ils n’accordent de l’intérêt qu’à ce qu’ils produisent. Certains commencent même, sais-tu ? à élever des insectes pour approvisionner les rayons alimentaires de leurs grands magasins.

- Les souris disent que les humains ne supportent pas que d’autres vivants mangent à la même table qu’eux, les loups l’ont payé très cher, rétorque le héron.

- Les humains de nos régions commencent à accepter les loups et les ours, dit l’hirondelle. C’est un progrès. S’ils se mettent à manger des insectes, peut-être auront-ils davantage de considération pour tous les insectivores, araignées, musaraignes, chauves-souris, crapauds et pangolins qu’ils ne portent pas en estime.

- Que ma vue soit (h)erronée, ne m’étonne, ni me rassure, dit le héron garde-bœufs désabusé


Mon attachement aux hirondelles me porte à enquêter au-delà de la campagne berrichonne pour savoir ce qu’elles deviennent quand elles la quittent.


La migration de nos hirondelles

Comme la plupart des humains, c’est pour survivre que nos hirondelles migrent. Elles savent que la baisse de la température au-dessous de 12° ne leur permet pas de trouver les insectes dont elles se nourrissent. Elles savent aussi que très très loin vers le sud, au-delà d’une grande étendue d’eau salée et d’un immense désert de sable, les insectes abondent à la faveur de la chaleur, des pluies et des forêts.


Sans attendre les premiers frimas, les hirondelles se préparent pour ce voyage. Il leur faut d’importantes réserves d’énergie pour parcourir des 5 à 6 000km qui leur donnent une petite chance d’échapper à la famine hivernale. A cette fin, les jeunes hirondelles puis les adultes qui ont terminé de nourrir leurs poussins partent passer la nuit dans les roselières autour des étangs les plus proches où éclosent encore de nombreux insectes. En sécurité dans leur dortoir de phragmites, elles consacrent leurs journées entières à la chasse et se gavent au point d’augmenter leur poids habituel (18g) de 30% en deux ou trois semaines. A défaut de roselières, les hirondelles se replient, m’a-t-on dit, sur les champs de maïs qui ressemblent aux roseaux à balais, mais le festin y est sans doute plus laborieux. Une fois le plein de carburant fait tant bien que mal, arrivent les ultimes rassemblements et trissantes conversations sur les fils avant le grand départ.


Regroupement d'hirondelles rustiques avant leur migration en automne. Ce spectacle s'est raréfié depuis leur disparition progressive sous nos latitudes. © R. Boivinet

Un poème de Théophile Gautier (Ce que disent les hirondelles) m’avait fait longtemps croire que nos hirondelles partaient vers la Grèce, Malte et le Proche-Orient. C’était méconnaître leur cap et sous-estimer leur courage. Le baguage couramment pratiqué depuis le siècle dernier permet d’établir des cartes migratoires qui révèlent que nos hirondelles rustiques se rendent vers les forêts de l’Ouest africain au-dessus de l’Équateur, du côté de la Côte d’Ivoire, du Nigéria, du Ghana, du Bénin, du Togo… Après encore quelques possibles pauses sur des roselières du sud de la France, elles vont donc franchir la Méditerranée, puis le désert saharien par l’ouest, pour arriver sur les savanes avec les pluies apportant les insectes volants nécessaires à leur survie.


Ce n’est pas l’itinéraire qui va les embarrasser : les jeunes hirondelles ne vont pas quitter des yeux leurs ainées qui, ayant gardé en mémoire le trajet, vont leur servir de guides pour leur premier voyage. Il se fera à environ 40 km/heure principalement de jour, ce qui permet encore aux hirondelles de saisir au vol quelques proies. Mais les embûches ne vont pas manquer : les 600 km au-dessus de la mer à franchir d’une traite seront fatals aux plus faibles ; une tempête violente pourra précipiter à l’eau même les plus vaillantes, des vents de sables sahariens pourront les aveugler et les ensevelir. Affamées en arrivant, on les verra curieusement en chasse au-dessus des forêts alors que chez nous elles semblent n’apprécier que les espaces ouverts.


L’abondance de nourriture va être mise à profit par l’hirondelle pour changer son plumage usé par une année de vol, en commençant par ses précieuses rémiges. Cette mue exigeante en énergie va diminuer pendant plusieurs semaines les performances de chasse et pourra affaiblir nos migrantes si les sites de repos se trouvent éloignés des sites d’alimentation. Leur affaiblissement sera d’autant plus gênant que les hirondelles seront exposées à d’autres dangers : tornades et orages, épandages de pesticides sur les cultures de cacao, de café et de coton, et même, pratiques de chasse avec possiblement l’excuse de la faim. J’ai trouvé mention de tirs mortels au lance-pierre par des enfants et un ami m’a signalé un reportage de pêche à l’hirondelle consistant à projeter en l’air un fil avec un termite fixé à un hameçon, le butin étant servi à table. Au Nigéria, les hirondelles semblent toujours être un gibier recherché comme hier encore les alouettes à Nohant et les bruants ortolans dans les Landes. A ces misères de tous ordres, s’ajoute une âpre compétition alimentaire inter-espèces, l’Afrique comptant à elle seule pas moins de 37 espèces d’hirondelles potentiellement concurrentes des migrantes pour l’alimentation de leurs petits.


On comprendra que dans ces rudes conditions de séjour, l’instinct de reproduction puisse pousser nos hirondelles à repartir pour nicher là où elles sont nées, malgré des risques aussi grands pour le retour que pour l’aller. Au total, cette migration que l’on imaginait de confort, va être mortelle pour de nombreux oiseaux, notamment les jeunes issus des dernières couvées. On estime qu’à peine un poussin sur 4 reviendra nicher au pays natal et que sur 10 hirondelles s’envolant vers l’Afrique, moins de 4 en reviendront. Tel est le prix que payent les hirondelles pour leur survie pendant l’hiver. On comprend mieux que très rares sont les hirondelles qui atteignent l’âge de 5 ans alors que leur potentiel de vie est de 16 ans. On comprend mal qu’on n’ait pas davantage d’attentions à l’égard de ce petit chef-d’œuvre de l’évolution qui vient enchanter notre ciel.


Les pesticides et le réchauffement climatique

L’attention portée aux pays de migration postnuptiale des hirondelles rustiques m’amène à revenir sur deux sources de malheurs pour elles : les pesticides agricoles et les épisodes climatiques extrêmes.


Déjà reconnus comme fléau pour nos hirondelles dans les pays européens, les pesticides agricoles le sont en puissance beaucoup plus encore dans les pays africains moins développés. La première raison tient au manque connu de qualification des agriculteurs pour utiliser des produits dangereux ; selon une étude de la FAO de 2015, 4% seulement suivent les consignes de protection. La seconde raison tient à l’énorme potentiel de profit que ces pays représentent, qui seul permet de comprendre que des pesticides reconnus dangereux tant pour les humains que pour la biodiversité, interdits dans l’UE, soient libres à l’exportation et massivement exportés, notamment vers l’Afrique. En France, en contradiction avec la loi Alimentation de 2018 qui interdisait (art 83) de faire des affaires avec des pesticides reconnus toxiques par l’UE, le Parlement n’a-t-il pas, en 2019, reporté de 2022 à 2025 l’interdiction d’exportation de ces substances, notamment les funestes néonicotinoïdes ? L’argument avancé par les sociétés agrochimiques selon lequel chaque pays a le droit souverain de décider quels produits répondent le mieux aux besoins de ses agriculteurs, est irrecevable tant les pays pauvres manquent, plus encore que les riches, de capacités d’évaluation et de contrôle. Le péril de nos hirondelles rustiques tient donc aussi au déséquilibre des rapports Nord-Sud venu de la colonisation et entretenu par la puissance des firmes multinationales. Mettre fin d’urgence à tout commerce de pesticides reconnus toxiques, sauverait à la fois des hirondelles et des humains.


Plus encore qu’en France, les hirondelles sont exposées en Afrique de l’Ouest à des évènements climatiques extrêmes de plus en plus fréquents (pluies diluviennes, chaleurs brûlantes, tornades …) De toutes les catastrophes, ce sont, semble-t-il, les sécheresses longues qui affectent le plus la vie des hirondelles. Si les inondations font proliférer les insectes volants jusqu’à l’excès, les sécheresses les raréfient, faisant dépérir les troupeaux et les végétaux, provoquant des incendies de forêts et accroissant la pollution de l’air. Les épisodes de sécheresse sévère dans les semaines précédant le départ des hirondelles pour la reproduction, se révèlent être les plus redoutables : n’étant pas en mesure de constituer des réserves de graisse, elles vont périr d’épuisement en plus grand nombre au cours du voyage de retour, et cela d’autant que le désert du Sahara tend à s’élargir.


Sur les territoires mêmes de reproduction, les canicules à répétition pendant les périodes d’élevage (2003, 2015, 2018, 2019) accentuent la mortalité des poussins qui sont moins bien nourris ; de surcroît, en tentant de s’écarter les uns des autres dans les nids où ils étouffent, les oisillons précipitent les plus faibles au sol où rôdent les chats.


On ne peut exclure que le réchauffement climatique affecte même la migration postnuptiale. Celle-ci n’étant qu’une stratégie adaptative comportementale, non inscrite dans les gênes, il apparaît vraisemblable que les hirondelles perdent leur habitude de migrateurs au long cours à la faveur d’automnes très doux. Déjà des sites d’hivernage d’hirondelles rustiques espagnoles et portugaises ont été signalés au nord du Sahara, et quelques hirondelles françaises semblent se satisfaire de la Camargue et du littoral atlantique pour attendre le printemps. La sédentarisation déjà observée pour quelques espèces réputées migratrices (comme la fauvette à tête noire au régime alimentaire mixte) n’apparait pas souhaitable car elle exposerait nos hirondelles insectivores à des coups de froid tragiques en raison de sévères famines, d’autant que de vastes opérations de drainage ont fait disparaître quantité de milieux humides favorables à leur survie.


Une mobilisation internationale contre le réchauffement climatique et l’élimination des pesticides jusque dans les zones d’hivernage avec le secours de l’agroécologie, nous apparaissent finalement comme des solutions incontournables pour garder la compagnie des hirondelles. Ces solutions importent aussi pour l’avenir des humains. Avec les hirondelles, mille égards sont possibles pour qu’elles gardent espoir. Leur compagnie nous aidera à maintenir le nôtre.




Jacques Aubourg

Mai 2021





« Il faut bien que je supporte deux ou trois chenilles si je veux connaitre les papillons. Il parait que c’est tellement beau » dit la rose au Petit Prince.

Antoine de Saint-Exupéry


« L’agroécologie peut parfaitement nourrir 10 milliards d’humains ».

Marc Dufumier, agronome


L’investigation présentée ici a été réalisée dans le cadre d’une expérience pilote inspirée du livre de Bruno Latour : Où atterrir ? comment s’orienter en politique –Groupe de La Châtre.



Alliés :

- La faune sauvage exclusivement ou partiellement insectivore : oiseaux (pics, martinets, mésanges…), chauves-souris, musaraignes, reptiles (dont lézards), grenouilles et crapauds, poissons d’eau douce…


- Les agriculteurs défenseurs d’une agriculture paysanne, attachée au bocage et au système polyculture-élevage favorable tant à la fertilité des sols qu’au maintien de l’avifaune.


- Les agriculteurs qui s’orientent vers l’agriculture biologique pour des motifs divers, au rang desquels la protection de leur propre santé (tel Éric, mon plus proche voisin).


- Les arboriculteurs professionnels et amateurs qui font le lien entre la protection des hirondelles et celles d’autres insectivores tels que les mésanges et chauves-souris qui détruisent des parasites des arbres fruitiers.


- Les particuliers qui s’orientent vers les produits biologiques locaux, ayant fait le lien entre leur propre santé et la santé des écosystèmes dans lesquels ils vivent.


- Toutes les personnes plus sensibles aux oiseaux et aux papillons qu’aux derniers gadgets de l’économie marchande.



Conflits d’intérêts :

- Les insectes volants victimes à la fois des pesticides chimiques et des hirondelles (on peut imaginer qu’ils choisissent le moindre mal).


- Les personnes trop déterritorialisées et/ou trop préoccupées par leurs fins de mois pour pouvoir s’intéresser à la protection des hirondelles.


- Les agriculteurs défenseurs avec la FNSEA du modèle agricole dominant, au motif qu’il est moins exigeant en main d’œuvre (avantage contestable en temps de chômage) et en énergie fossile (vérifié en grandes cultures), et mieux en mesure de nourrir la population mondiale que l’agriculture biologique (faux selon l’agronome Marc Dufumier, pionnier de l’agroécologie).


- Les industries agrochimiques qui font pression sur les gouvernements pour autoriser des pesticides toxiques au nom de la sauvegarde des emplois (argument fallacieux, les firmes n’hésitant pas à détruire des emplois pour sauvegarder ou accroître leurs profits dans l’intérêt des seuls actionnaires).


- Les végétariens et véganes militants qui, sous prétexte de défendre les animaux, condamnent les élevages pourtant favorables à certains milieux, à la fertilité des sols et à bon nombre d’insectes et d’oiseaux, notamment les hirondelles.


- Les personnes entomophobiques ou allergiques aux piqûres d’insectes qui peuvent souhaiter la disparition des insectes au prix de la disparition des hirondelles.



Doléances :

Aux municipalités (maires et conseillers municipaux des environs)

- publier chaque printemps la règlementation qui protège les hirondelles.

- recréer des mares pour abreuver les hirondelles, leur offrir une source de boue pour la construction de leurs nids et améliorer leur nourriture par les insectes aquatiques.


Aux habitants des campagnes (voisins, amis…)

- Favoriser l’installation des hirondelles dans les dépendances de leurs maisons d’habitation en leur ménageant un local avec une lucarne maintenue entrouverte, et en fixant quelques nids artificiels en forme de 1/2coupe ou de godet.


Aux jardiniers (parents, amis…)

- Adopter les méthodes de jardinage biologique.

- A défaut d’un plan d’eau dans les environs, installer en période de sécheresse un abreuvoir de grande largeur dans un espace découvert (l’hirondelle buvant en vol, en rasant l’eau).


Aux agriculteurs (voisins)

- Maintenir un maillage de haies arborées qui, entre autres avantages, servent de refuges aux insectes et permettent aux hirondelles de se nourrir par temps de pluie.

- Adopter les méthodes de l’agriculture biologique.


Aux particuliers (parents, amis…)

- Recourir aux produits alimentaires biologiques certifiés.

- Remplacer les insecticides ménagers non sélectifs par des répulsifs ou par un piégeage des insectes les plus invasifs.


Aux pouvoirs publics (parlementaires, élus des collectivités territoriales …)

- Mettre en œuvre des politiques sociales et d’éducation permettant à tout humain de se penser en lien avec tous les vivants.

- Interdire l’usage de pesticides non sélectifs pour la protection des cultures qu’elles soient alimentaires ou industrielles.

- Développer la recherche de méthodes biologiques de protection des cultures.

- Généraliser la formation à l’agriculture biologique dans les établissements d’enseignement agricole.

- Favoriser par des aides appropriées la transition de l’agriculture conventionnelle à l’agriculture biologique et supprimer toutes les aides publiques à l’agriculture nuisible aux écosystèmes.

- Développer la demande de produits alimentaires biologiques par la restauration collective.


A l’Union Européenne (députés européens)

- Cesser l’exportation de produits agricoles subventionnés qui ruine l’agriculture vivrière africaine, favorise en conséquence l’exode rural et la paupérisation.

- Interdire l’exportation vers les pays en développement de tous les pesticides dont l’usage a été interdit dans l’UE.

- Apporter une aide aux pays africains les moins aptes à faire face aux crises sanitaires et catastrophes climatiques.

- Développer un partenariat euro-africain pour lutter contre le réchauffement climatique.

- Faire entrer le crime d’écocide dans le droit international.



Documentation :

- Georges Olioso, Les Hirondelles, Delachaux et Niestlé, 198 pages, 2020

- Marc Dufumier et Olivier Le Naire, L’agroécologie peut nous sauver, Actes Sud, 176 pages, 2019

- Francis Roux, Risques et Périls pour les oiseaux d’Europe hivernant en Afrique tropicale. Les Cahiers d’Outre-Mer, Année 1990, pp. 399-412

- Vigie Nature Suivi Temporel des Oiseaux Communs http://www.vigienature.fr/fr/hirondelle-rustique-3463

- LPO Les oiseaux protégés

- Wikipédia, L’hirondelle rustique

- La migration de l’hirondelle rustique http://www.hirondelles.oiseaux.net/migration.html

- Suivi des populations d’hirondelles rustiques

- Conclusions de l’évaluation intégrée mondiale sur les risques des néonicotinoïdes et du fipronil pour la diversité et le fonctionnement des écosystèmes

- Magazine Reporterre. L’usage des pesticides est en forte hausse. Janvier 2020 https://reporterre.net/L-usage-des-pesticides-est-en-forte-hausse

- France Stratégie

- Sésame. Pourquoi l’usage de produits phytosanitaires augmente-t-il ? n°8 Nov 2020

- Le Monde du 29 octobre 2019

- Effets sur l’environnement des traitements antiparasitaires https://www.ufarevue.ch/fre/production-animale/antiparasitaires

- Revue La Hulotte, N° 58, 60, 62, 64, 67 et 70

- Public Eye Pesticides interdits : l’hypocrisie toxique de l’Union Européenne https://www.publiceye.ch/fr/thematiques/pesticides/pesticides-interdits-ue

- Le Monde du 17 juin 2019


Merci à :

- Bruno Latour et Baptiste Morizot (Manières d’être vivant, Actes Sud) pour avoir orienté définitivement mon attention sur les interdépendances entre tous les vivants.

- Chantal Latour et Soheil Hajmirbaba pour m’avoir encouragé à concentrer mes investigations sur la disparition d’un oiseau qui m’enchante depuis toujours.

- Jacques Lucbert, Président d’Indre-Nature et à Thomas Chatton, Chargé de mission Faune à Indre-Nature pour leurs précieuses pistes de renseignements.

- Sébastien, Yannick, Éric, Jean-Noël, Gérard, Hervé, Vanessa, Mame Fatime, Patrice, Vincent, Dina, Jean-Pierre, Corinne… pour leurs documents, informations, observations et contacts.

- Dominique, pour son soutien de tout instant.




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